Exutoires : industrie du recyclage, encore et toujours en manque

Le 05/02/2019 à 7:13  

Exutoires : industrie du recyclage, encore et toujours en manque

Interdiction La conférence de presse de fin novembre (voir notre exposéavait pour but de lancer une alerte quant à la situation qui prévaut au vu du problème auquel sont confrontées bien des entreprises de recyclage.Tout laisse à penser que 2019 sera plus difficile pour les recycleurs, ne serait ce que par le défaut de visibilité. Déjà, des sites ont fermé puisque ne pouvant pas évacuer les inévitables résidus ultimes générés par les activités mises en oeuvre, visant à produire des matières recyclées de qualité... 

 Depuis la fin d’année 2018, la saturation de nombreux centres d’enfouissement des déchets sur l’ensemble du territoire français contraint plusieurs entreprises du recyclage à mettre à l’arrêt certaines de leurs installations faute de débouchés pour leurs déchets ultimes. Ainsi dans le Sud-Est, le président de la région Paca, Renaud Muselier, a été alerté par les professionnels du recyclage locaux : manquaient environ 35 000 tonnes complémentaires de capacités des stockage pour boucler l'année 2018

 Faut-il rappeler, une fois encore, que le processus de recyclage produit irrémédiablement une fraction résiduelle non recyclable qui n’a d’autres choix que d’être enfouie ou parfois incinérée? Normalement non. Encore que... Ces déchets ultimes ne peuvent évidemment pas s’accumuler sur les sites de recyclage, puisque leur stock est fixé par arrêté préfectoral et que de toute manière, une entreprise de recyclage n'est pas un centre de stockage. Si les déchets ultimes ne peuvent pas être évacués, c’est toute la chaîne de recyclage qui est alors bloquée.
Pour autant, malgré ces constats et évidences, tout laisse à penser que la situation sera plus difficile en 2019, qu'elle ne l'aura été fin 2018 : ainis, dans la même région sudiste, on évoque un déficit de capacité de stockage de 350 000 tonnes pour l'année qui vient de débuter. Les entreprises concernées redoutent tout autant les risques d'incendie sur leurs sites, ou encore la mise au chômage technique de certains de leurs collaborateurs, que l'absence de visibilité concernant les engagements mensuels de volumes de la part des installations de stockage : les choix de ces dernières pourraient faire aussi bien en ce qui concerne les catégories de déchets entrant que l’évolution de leurs conditions tarifaires, compte tenu de la réduction croissante des capacités autorisées, sont tout à fait incertains.

D’ici 2025, ce sont 8 à 9 millions de tonnes de déchets pour lesquels il faudra trouver une solution de valorisation. En 2019, « nous estimons une carence de capacités d’enfouissement de déchets ultimes entre 600 et 800.000 de tonnes sur le territoire national », estime Federec.
À ce jour, il y a peu de solutions alternatives de valorisation pour traiter les déchets ultimes qui ne pourront plus être stockés (développement de la demande de CSR par exemple) « alors même que nous constatons une augmentation globale des déchets à gérer, liée pour partie à la fermeture des frontières chinoises à l’importation de certains déchets valorisables, ou encore la prime à la conversion des véhicules. Et si certaines filières peuvent être mises en place, elles sont toujours plus coûteuses ».

S’ajoute à cela, « la baisse des prix de vente, de certaines fractions issues du recyclage des déchets métalliques, induite en partie par l’interdiction d’exportation vers la Chine de certains déchets non-ferreux, mais aussi de l’abondance soudaine sur le marché européen, d’autres fractions, à la suite de la mise en place des droits de douane imposés par la Chine, sur les déchets solides en provenance des États-Unis ».
Même si « nous pensons qu’à terme, cela aura pour effet de relancer le développement de nouvelles techniques de recyclage, sur notre territoire, et de retrouver une partie de la valeur ajoutée, les coûts de recherche et développement sont capitalistiques : les techniques et solutions ne peuvent être mises en place instantanément».
Que faire dès lors que certaines entreprises ont d'ores et déjà fermé des sites?... Derichebourg a en effet fermé deux sites de broyage dans le Sud-Est, du côté de Nice et de Marseille. Mais en vérité, « c'est toute la filière amont qui est menacée : les démolisseurs, les déchetteries, les éco-organismes...», a exprimé Sandra Rossi, présidente de Federec Sud-Méditerranée. D'ores et déjà des problèmes similaires se profilent à l'Est de la France et nul doute qu'il pourrait y en avoir d'autres ailleurs dans un proche avenir...
C'est du non sens que de souhaiter davantage de recyclage, en occultant qu'il y aura plus de déchets ultimes : les professionnels ont besoin d'exutoires. La concertation s'impose avec les collectivités régionales, la région étant le planificateur tandis que les services de l'Etat délivrent les autorisations nécessaires. Il y a urgence ; quand bien même le temps administratif n'est pas le même que le temps industriel, souhaitons une prise de conscience collective rapide et surtout l'adoption de mesures adéquates afin de débloquer la situation.