A 70 ans, Federec croit plus que jamais en son devenir

Le 21/12/2015 à 15:08  

A 70 ans, Federec croit plus que jamais en son devenir

Champagne! 17 décembre 2015, une date à retenir à plus d'un titre. Rendez-vous était donné par Federec avec ses adhérents, dans le cadre somptueux de l'Hôtel de Ville de Paris afin de fêter les 70 années d'existence de la Fedération des entreprises du recyclage. Moment d'exception qui a permis de retracer le parcours de l'entité syndicale, mais aussi de nombre de ses membres qui exercent aujourd'hui, un métier que leurs aïeux ont pratiqué, le plus souvent par obligation... La soirée de jeudi a été aussi, le moment choisi pour présenter le livre blanc des professionnels du secteur, qui projette l'industrie du recyclage à l'horizon 2030, mais également pour annoncer la réélection de Jean-Philippe Carpentier en qualité de président pour les trois années à venir...

 On a désormais l'habitude de souligner que dans un monde où la matière devient rare, les entreprises du recyclage, productrices de nouvelles matières premières (à partir des déchets récupérés), répondent aux besoins croissants des entreprises consommatrices. Il est d'usage aussi, d'indiquer que ces Nouvelles Matières Premières constituent une ressource économique stratégique...

Un métier qui relève du bon sens...
Cela dit, avant de gaspiller à grande échelle comme nous avons insidieusement appris à le faire au XXème siècle, la récupération, pratiquée par des hommes ayant le sens pratique développé, voyant dans ce qui ne servait plus à certains, la possibilité de faire autre chose, a toujours été de mise... Ne dit-on pas que la récupération est l'un des plus vieux métiers du monde ?

Les Romains organisaient la récupération des glaives sur les champs de bataille, parce qu'on avait bien compris qu'il était moins compliquéCorinne Lepage de récupérer, voire de réparer, que de re produire et donc d'extraire le minerai pour produire le métal avant de forger l'arme…
De la même manière que l'on a longtemps utilisé les chiffons pour faire du papier, des peaux de lapin pour produire du feutre... Combien d'autres choses encore ont été récupérées pour être négociées : des bouts de cordes ou de ficelles, des cheveux, des bouts de cigares ou de cigarettes afin de récupérer le tabac résiduel, de la porcelaine, des bougies ... Tout ce qui pouvait re servir, être re fondu, re tissé, était récupéré, trié et réinjecté dans le circuit économique. 
Depuis la nuit des temps, les hommes ont évolué, appris à fabriquer, à créer, mais aussi à récupérer ce qui pouvait l'être, et à transformer le fruit de cette récupération. On ne s'étonnera donc pas que le récupérateur ait toujours su s'adapter, puisqu'il a toujours dû « coller » aux réalités de son temps, pour perdurer... Et c'est ainsi, que cette activité pratiquée par des hommes de bon sens, s'est bel et bien maintenue au fil des siècles...
Si le récupérateur d'antan est devenu recycleur, si l'artisan d'hier est devenu industriel, cette règle de l'adaptation permanente n'a pas cessé d'être, tant elle est intrinsèque au métier...
Un métier de tradition pour certains, pratiqué de père en fils dans des entreprises restées familiales... Un métier qui a aussi attiré des personnes audacieuses qui l'ont adopté à la fin du XXème siècle, ne craignant pas d'arborer le blason du recycleur, de défendre les couleurs du recyclage, tant elles ont été convaincues de l'avenir en grande largeur que les temps modernes réserveraient inévitablement, inéluctablement, à cette activité ancestrale...

« Ce métier est différent des autres ; on ne peut l'exercer sans passion. Et dans ce métier, de parole, il faut respecter les règles : travailler dur, être solidaire, être commercialement habile et aimer les relations humaines... Cela dit, nous ne sommes pas des anges », souligne Patrick Kornberg, président de Federec Métaux non ferreux qui aime à rappeler que les recycleurs constituent une famille : c'est dans les « gênes du recycleur, que d'aller chercher partout où il peut, des matières récupérables et les valoriser ».
Si certaines matières comme « la ferraille ou les métaux ont été récupérés et recyclés de tous temps, il en est d'autres, comme les plastiques, les pneus, les solvants, qui ont plus récemment rejoint l'univers du recyclage. Les professionnels que nous sommes, se questionnent en permanence afin d'apporter à la société les meilleures solutions pour recycler et valoriser les matières dans de bonnes conditions »...
Patrick Kornberg« Je rigole toujours lorsque j'entends dans la société, qu'il faut s'occuper du recyclage comme si ça venait de sortir et que rien n'a été fait jusqu'à présent »...
Ce qui a changé, c'est la technicité : on faisait tout ou presque à la main, jusqu'à la fin des années 60. L'industrialisation du métier s'est peu à peu imposée. La profession a vécu sa révolution industrielle après les chocs pétroliers : peu à peu les chantiers se sont mécanisés ; on y a introduit des broyeurs et cisailles, des presses et autres compacteurs, courants de Foucault, tapis convoyeurs et de triage... autant d'outils qui ont permis d'intégrer la notion de productivité sur les chantiers, et de soulager les hommes, aussi...
Les centres de tri d'abord rudimentaires, mais désormais ultra mécanisés, automatisés, intégrant des machines de tri optique, ont fait leur apparition, eux aussi ; au demeurant, Aktid l'un des acteurs majeurs dans ce domaine de compétences (installation et mise en service de centres de tri de déchets), comptait parmi les parrains de cette soirée anniversaire...

table ronde federec
 
De gauche à droite : Corinne Lepage, Jean-Philippe Carpentier, Yann Vincent  et Nathalie Croisé
Et qui met le cap sur son avenir...
Nul doute que les métiers du recyclage ont pleinement intégré l'économie : les entreprises sont ICPE, assujetties à des normes et contraintes administratives de plus en plus rigoureuses ; elles ont investi des sommes colossales pour se développer et répondre aux attentes des consommateurs de ces matières recyclées... C'est dire, si les recycleurs, rassemblés au sein de Federec croient en leur avenir. C'est donc tout naturellement ou presque, que la fédé présentait son Livre blanc « L'industrie du recyclage à l'horizon 2030 »...

Préfacé par Corinne Lepage, femme engagée, ancienne ministre de l'environnement et avocate spécialisée en droit de l'environnement, ce fascicule de 70 pages pose la question de savoir quelle sera la place du recyclage dans les dix ou vingt ans qui viennent : « ce livre blanc est un modèle du genre et ce n'est pas un hasard. Cette thématique est centrale pour la nouvelle économie car elle est au carrefour de nombreuses problématiques : économie circulaire, matières premières recyclées, chaîne producteurs/consommateurs et même éco-conception ». « Il n'est donc pas surprenant que ce secteur s'interroge sur son avenir qui devrait être plus que prometteur et qui est en réalité confronté aux ravages d'un prix du pétrole devenu si bas qu'il conduit à revenir à l'économie linéaire, dans la mesure où il est moins co

Jean-Philippe Carpentier
ûteux aujourd'hui d'acquérir une matière première primaire, qu'une matière recyclée. Ce non sens économique rendu possible par une absence d'internalisation des coûts externes et en particulier d'un coût du carbone, pèse évidemment sur le recyclage et toute l'industrie de la réutilisation », expose Corinne Lepage qui participait à la table ronde organisée pour l'occasion.

Il a fallu trois ans pour concocter l'ouvrage : trois années d'enquêtes, d'analyses et de travail avec les adhérents mais pas seulement, avant de dégager les tendances de fond des marchés du recyclage, les atouts et les faiblesses de cette profession ancienne et moderne à la fois, qui doit se « frotter » à une concurrence exacerbée, mais également « faire avec » les prix des matières vierges (qui ont chuté de manière spectaculaire, depuis près de deux ans), et subir les conséquences de l'absence d'internalisation des coûts externes. Bref : il est temps de prendre un virage afin de modifier la vision que l'on a de ce métier, tout en transformant cette activité : il faudrait, dans l'absolu, intégrer les émissions de carbone dans le prix global, ce qui favoriserait un rééquilibrage en faveur des matières recyclées et au détriment des matières vierges (largement plus émissives).
« Avec un tarif à 37 dollars le baril de pétrole, il est impératif de chercher et trouver des solutions autres, visant à repenser notre activité. Il n'y a pas si longtemps, cinq ans environ, on croyait ferme à un prix des matières premières à un niveau suffisamment élevé pour que l'emploi du recyclé ne soit pas un problème » (tant il aurait été compétitif, tandis que les matières recyclées proposées auraient été de qualité afin qu'il n'y ait aucun frein à leur emploi dans l'industrie), a indiqué Yann Vincent, qui préside la Commission Prospective et Innovation de Federec, et qui a coordonné les travaux sur le Livre Blanc.
Qu'on y prenne garde : ces prix bas et faussement attractifs ne signifient pas que les matières sont plus abondantes, au contraire ; on parle bien de ressources épuisables et dont on doit gérer l'utilisation de manière intelligente. Dans ce contexte, réaffirme Jean-Philippe Carpentier, « nous devons jouer le rôle de chasseurs d'alerte ».

Recyclage


Le métier n'est pas condamné pour autant, on l'aura bien compris : il devra évoluer, comme il l'a toujours fait, pour se mettre au diapason. Etant assujetti à de très nombreuses règles administratives, lesquelles sont issues de lois et règlements, il faudra se servir de l'administration et par conséquent de la législation pour obtenir une autre reconnaissance.
Par ailleurs, à l'avenir, non seulement il y aura d'autres matériaux à récupérer pour les recycler, mais ceux-ci seront sans doute plus diffus, pluscomplexes à traiter, et donc plus techniques. Les volumes seront plus réduits, mais leur valeur sera sans conteste plus importante. Le tri qui s'imposera sera beaucoup plus précis...
Exercer ces métiers du recyclage passera par de nouveaux investissements ; l'innovation y trouvera bonne place. Tout ceci ne se fera pas sans l'aide des pouvoirs publics, transition énergétique, préservation du climat et économie circulaire obligent.
Les progrès se feront en aval et en amont : s'il est incontestable qu'il faille miser sur la R&D afin de mieux connaître les gisements, il sera aussi (et c'est le but du livre blanc que de fournir des pistes de réflexion) nécessaire de certifier la recyclabilité des produits issus du recyclage, soutenir une politique industrielle durable, réintégrer les externalités, élargir les marchés pour favoriser l'emploi de recyclé, impliquer davantage le consommateur, améliorer l'image de marque du recycleur, et enfin, former sur l'éco-conception et le recyclage.
Jean-Luc Petithuguenin

 
Il revenait à Corinne Lepage de conclure : ce livre blanc des professionnels du secteur « démontre que la profession, malgré les difficultés économiques qu'elle rencontre, reste positive en rebondissant sur des valeurs et des opportunités pérennes ». La réutilisation des matériaux, « le ré-usage optimal des déchets considérés comme une matières première, sont un impératif qui impactera de manière croissante laconception, la production et même la consommation ». Il n'est donc pas étonnant que Federec « ait fait le choix de jouer un rôle majeur dans la construction de ce Nouveau Monde et du mouvement des entreprises qui l'accompagne »...

A la suite de quoi, Jean-Philippe Carpentier prenait le micro afin d'annoncer sa réélection en qualité de président de la fédération pour les trois années qui viennent, et la nomination de Jean-Luc Petithuguenin en qualité de vice-président (il succède à Jean-Pierre Gaudin qui occupera désormais le poste de trésorier de la fédération, poste auquel il succède à Jean-Philippe Sepchat). Deux présidents de région, Sandra Rossi et Pierre Yves Barbazanges, deux présidents de branche, Pascal Geneviève et Patrick Kornberg, ainsi que les deux présidents d'honneur, Dominique Maguin et Pascal Secula, complètent le nouveau bureau fédéral, validé par Jean-Philippe Carpentier.

 

Anniversaire de Federec