Consigne des emballages : le top départ a été donné

Le 21/06/2019 à 7:39  

Consigne des emballages : le top départ a été donné 

Consigne Comme annoncé dans notre dépêche de ce lundiBrune Poirson a réuni ce jour à Strasbourg des élus, des ONG, des représentants des fabricants de produit afin de lancer un comité de pilotage qui aura vocation à explorer les conditions et les modalités de mise en œuvre de la consigne en France. Une initiative qui sera sans doute saluée par certains, mais pas par les collectivités locales, ni par les recycleurs, qui dénoncent un manque à gagner après avoir investi pour recycler, et voient dans cette collecte à double vitesse un moyen d'augmenter les coûts du traitement des déchets puisque les recettes liées à la vente des matières seront à la baisse...

 Alors que l'éco-organisme Citéo annonçait tout récemment un taux de recyclage des emballages ménagers en hausse de 2% en 2018 par rapport à 2017, ce qui correspondrait à 132 000 tonnes d’emballages supplémentaires recyclées sur une année et porterait le tonnage global à 3, 5 millions de tonnes, une nouvelle trajectoire semble se dessiner.
La chouchoute du moment n'est autre que la consigne que d'aucuns présentent comme Le bon moyen de palier les carences liées à la collecte sélective des déchets d'emballages, telle que nous la connaissons depuis un quart de siècle.

Dès lors que l'on se penche sur la revue de détail, il apparaît que les emballages en acier sont captés à 100%, Citéo soulignant que cela inclut les mâchefers issus de l'incinération, ceux en alu à 44%, les emballages en papiers cartons à 68% (briques : 52,5% / autre que briques : 69%), le verre à 86,5% et le plastique à 26,5%, l'éco-organisme précisant que les bouteilles et flacons sont captés à 58%, tandis que les autres emballages en plastique sont récupérés à hauteur de 4%. Ceci ne signifiant évidemment pas que le reste atterrit dans la nature, mais le plus souvent dans le mauvais bac, celui des OMR. Pour autant, Citéo n'a rien contre la consigne ; l'éco-organisme financé par les metteurs sur le marché, serait favorable à l'idée que le gouvernement s'inspire de dispositifs déjà développés à grande échelle en Allemagne, au Danemark ou encore en Suède.

 Il existe clairement un manque à gagner (pour les exploitants de centres de tri, recycleurs et les collectivités locales) dès lors que les consignes de tri ne sont pas strictement respectées. Cela veut-il dire pour autant qu'il faille développer la consigne à grande échelle ? Les recycleurs comme les collectivités locales ne sont pas de cet avis pour plusieurs séries de raisons. On a investi des sommes conséquentes (se chiffrant à des millions d'euros) pour construire et moderniser des centres de tri qui se présentent comme des outils industriels qui ont été calibrés pour capter des tonnages déterminés, comprenant les bouteilles en plastique, et qui se doivent d'être amortis. Dès lors que la consigne serait fortement développée, les collectivités seraient amputées d'une source de revenus non négligeable (vente des matières triées), ce qui se traduirait par une augmentation des coûts globaux (ces ventes compensant une partie des coûts de gestion des déchets). Sans compter que cela poserait le problème de la propriété de la matière récupérée via cette consigne, et que cela éviterait aux promoteurs de ce système de payer tout ou partie de l'éco-contribution à l'éco-organisme... Avec des effets induits qui inquiètent : l'association Amorce a d'ailleurs mis en valeur des montants significatifs, qui seraient ainsi détournés du système éco-organisé piloté par Citéo... et de moindres soutiens au détriment des territoires. L'association qui défend les intérêts des collectivités locales ayant précisé qu'elle n'a rien contre la consigne, à condition toutefois qu'elle serve à capter les déchets difficiles à récupérer, et non pas à vider le bac jaune : en d'autres termes, la consigne ne doit pas se focaliser sur le plastique, mais devrait s’appliquer à des déchets tels que les DDS ou les piles, par ex.

Qu'à cela ne tienne ; en dépit du fait que nombreux sont ceux qui ont tiré la sonnette, la mise en œuvre de la consigne fait son chemin. Ce qui explique la création d'un Comité de pilotage. La première réunion, qui s'est tenue comme prévu ce  jour à Strasbourg, a duré environ deux heures ; elle a eu pour vocation de préciser la mission de ce Comité qui aura en charge d'explorer les conditions et les modalités de mise en œuvre de la consigne en France.
Brune Poirson, qui a régulièrement rappelé que la France est  « à la traîne » en matière de collecte et de tri des déchets, a en effet développé les contours de la mission dont seront investis les  membres du comité. Ils devront notamment :
Définir le type d’emballages qui sera concerné (les bouteilles en plastique, les canettes en métal, les bouteilles en verre)
Déterminer si la consigne sera préalable au recyclage ou au réemploi
Comment seront repartis les financements afin qu’aucune collectivité ne soit lésée ?
Qui aura la gestion de l’argent disponible (cautions en attente de leur déconsignation) ?
A qui appartiendront les emballages qui seront déconsignés ?
Qui paiera pour déployer les dispositifs de déconsignations qu'utiliseront les Français ?

La secrétaire d’Etat, qui n’hésite pas à parler de « big bang dans les poubelles des Français », a demandé que des premières conclusions soient rendues mi-septembre afin d’enrichir le débat parlementaire à venir sur le projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire qui comprendra une disposition pour autoriser le principe de la consigne sur le territoire. Jacques Vernier, co-président du comité de pilotage, Président du comité des filières REP, autorité morale dans le secteur, procédera à des auditions et mènera d’ici septembre l’ensemble des concertations nécessaires.
« Cette première réunion a été très constructive et a permis à chacun de partager son enthousiasme et parfois ses craintes. J’ai réaffirmé l’ambition et la ligne rouge fixés par le Premier ministre pour cette concertation. La ligne rouge d’abord, aucune collectivité ne sera lésée. L’ambition ensuite, nous devrons atteindre 90% de collecte en 2029 quand nous ne collectons aujourd’hui même pas 6 bouteilles en plastique sur dix. Au travail ! », a conclu le membre du gouvernement.