Déchets : moderniser le tri passera par la robotisation, en Somme...

Le 16/10/2018 à 10:00  

Déchets : moderniser le tri passera par la robotisation, en Somme...

Robot Max installé sur le centre de tri d'Amiens Il est artificiellement intelligent et s'appelle Max : ce robot serait non seulement à même de reconnaître certains types de déchets indésirables, mais aussi de les écarter, à tour de bras, articulé of course : affichant la capacité d'effectuer 3 600 gestes de tri à l'heure, il promet en tout cas à Veolia, qui l'a installé sur son site d'Amiens, d'automatiser davantage le tri des déchets ménagers, ce qui annonce une nouvelle étape dans la modernisation des centres dédiés, afin d'améliorer le recyclage, puisque tel est l'objectif... au détriment des emplois, ce que l'on peut supposer, aussi.

 2012 : la société ZenRobotics Ltd (créée en 2007) mettait au point un robot pour le tri des déchets recyclables ; le ZenRobotics Recycler, le ZPR, est en effet un système de tri des déchets qui sépare les matières premières des autres déchets. Ce Recycler, consiste en un tapis roulant pour déchets comme on peut déjà en croiser dans les centres de tri, à un détail près : il est équipé de bras robotisés qui effectuent le tri de manière autonome, et de capteurs, présents tout au long du tapis roulant ainsi que dans les bras robotisés : la robotisation du tri était en marche.

 Sous une autre forme, elle est arrivée en France. Installé depuis juin sur le  centre situé en zone industrielle d’Amiens-Nord, exploité par Veolia, Max AI, mis au point par une société américaine, est capable de reconnaître certains types de déchets indésirables sur le tapis roulant d'une chaîne de tri et, à l'aide d'un bras articulé, de les en écarter. L'idée étant de sortir le maximum de matières premières issues des déchets, dans une qualité optimale, ce qui favorisera la vente de celles-ci, et a contrario la réduction du taux de refus de tri des installations.
Veolia n'en est pas à son coup d'essai : Rob’Inn, développé par ses soins a été le premier robot de tri (qui remplace donc le tri à la pelle) dédié aux meubles en fin de vie, validé par Eco-mobilier, acquis par le Cyclad (syndicat mixte chargé de la gestion des déchets du nord de la Charente-Maritime), installé en France. Expérimenté dès décembre 2016 à Chermignac, sur le centre de traitement du Cyclad, il a fait ses preuves avant d'être officiellement inauguré il y a un an, en octobre 2017...

 Pour en revenir aux déchets d'emballages ménagers d'Amiens, le robot Max, qui est à même d'effectuer 3 600 gestes de tri par heure alors que l'opérateur humain en réalise environ 2 200, pose la question du maintien des emplois dans le secteur du tri, une question que l'on ne peut occulter, d'autant que dans un rapport de 2014, l'Ademe estimait que l'automatisation des centres de tri allait engendrer la suppression de 3 500 à 5 000 emplois.
S'il est avéré que le métier d'agent de tri dans le secteur des déchets est particulièrement pénible puisque les cas de TMS sont nombreux dans cette profession (pour réduire les risques, un groupe de travail réuni sous l'égide de l'AFNOR a travaillé à l'élaboratioRobot installé au centre de tri d'Amiens (photo FRANCOIS LO PRESTI pour l'Afp)n d'une norme rassemblant les principes ergonomiques essentiels à prendre en compte lors de la conception des cabines de tri de déchets, ndlr), on ne doit pas occulter non plus, que pour bon nombre de ces salariés, c'est ça, ou le chômage. Etant entendu que dans certaines entreprises, être opérateur de tri, c'est aussi la possibilité de bénéficier de formations en interne, de sorte à pouvoir passer à autre chose, mais en restant le salarié de ladite entreprise...
"Les robots vont améliorer les conditions de travail et de sécurité de nos opérateurs employés au tri sur les tapis. Ils vont diminuer le nombre d'opérateurs sur les opérations les plus complexes, les plus sales, mais il y en aura plus sur le contrôle-qualité. Et étant donné le volume de déchets qu'on va devoir traiter à l'avenir, on n'anticipe pas de baisse d'emploi", rassure Bernard Harambillet, directeur de la branche Recyclage et valorisation de Veolia pour la France, qui n'est pas sans ignorer que les centres de tri emploient de nombreuses personnes en insertion.

 Toujours est-il que c'est " une première européenne sur une chaîne de tri de déchets ménagers", complète Bernard Harambillet, qui n'a pas précisé le montant de cet investissement, ni le coût de mise au point de cette machine. En revanche, ce que l'on sait, est que Veolia a mobilisé sa R&D, avec une équipe dédiée à l'intelligence artificielle créée il y a cinq ans, mobilisant 200 chercheurs en lien avec un réseau de 800 experts. Celle-ci a formé l'algorithme de Max AI : reconnaître des dizaines de milliers de types d'objets qu'il est susceptible de rencontrer sur une chaîne de tri.  "Nous l'avons installé sur une chaîne de déchets fibreux : on lui demande de reconnaître et d'enlever tout ce qu'on ne veut pas", par exemple des pots de yaourt ou des canettes en aluminium, explique Anne Thevenot, directrice technique et performance France du groupe. Mais Max a encore à apprendre ;  il a des ratés et donc, un opérateur passe derrière lui pour une ultime sélection.

 En perspective, l'objectif français de réduire de moitié le volume de déchets mis en décharge d'ici à 2025, ce qui implique de mieux trier pour améliorer le recyclage, et surtout de recycler 100% des plastiques à cet horizon, contre autour de 26% aujourd'hui. Cette politique ne devant pas occulter un autre facteur d'importance : la Chine a annoncé, pour barrer la route à  une qualité qu’elle estime insuffisamment performante, qu’elle fermait son territoire à plusieurs matières premières recyclées.
En tout cas, dès 2022, partout en France, les habitants devront mettre dans leur poubelle dédiée aux déchets à recycler, tous les emballages, y compris ceux qui sont aujourd'hui destinés à la poubelle "grise". Les collectivités, tout comme les professionnels s'attendent donc à une augmentation massive du volume de plastiques à collecter et à trier.

Veolia Tri des déchets d'emballges ménagersa d'ores et déjà annoncé qu'il va déployer d'ici à 2020, deux robots dans un centre de tri en Loire-Atlantique, qui s'attaqueront aux plastiques. Cela dit, le groupe n'est pas le seul à moderniser ses centres de tri. Suez a investi 15 millions d'euros dans son centre situé dans le Val-de-Marne, équipé de six machines de tri optique, et Paprec, numéro trois du secteur, a récemment mis en service un centre important doté de trieurs optiques dans les Alpes-Maritimes. Les Ateliers Fouesnantais ont eux également intégré à la fin de cet été, un robot installé par leur fournisseur historique, Bollegraaf.
Outre le tri optique, les industriels utilisent des technologies toujours plus performantes tels que les courants de Foucault, pour séparer les petits objets en aluminium des autres matières, ou encore des systèmes de télé-opération qui permettent aux opérateurs de ne plus toucher les déchets mais de sélectionner les indésirables sur une tablette tactile représentant la chaîne de tri.
"Cette modernisation est essentielle pour améliorer la performance du tri en France", a conclu Jean Hornain, directeur général de l'éco-organisme Citeo qui mobilisera 190 millions d'euros d'ici à 2022 pour accompagner les collectivités et les industriels, l'objectif consistant à passer de près de 200 centres aujourd'hui à 130 en 2022, mais en version plus imposante, et équipés des dernières technologies de manière à propulser leurs performances...