L'agriculture périurbaine, un moyen de recycler utile...

Le 27/10/2011 à 15:15  

L'agriculture périurbaine, un moyen de recycler utile...
© IRD / D. Masse Depuis 2008, 1 humain sur 2 est citadin. L'urbanisation galopante s'accompagne de déchets toujours plus abondants. Que faire de toutes ces ordures ? Leur gestion constitue en effet un défi majeur pour les décennies à venir, en particulier en Afrique. L'agriculture périurbaine se révèle un véritable atout pour les villes de ce continent, conciliant valorisation des déchets, amélioration des sols et sécurité alimentaire...

 Pour mieux connaître le secteur et optimiser le traitement des détritus, des chercheurs de l'IRD (Institut de Recherche pour le Développement) et leurs partenaires ont dressé un état des lieux des acteurs et des pratiques dans la capitale burkinabè, Ouagadougou. Résultats : près des 3/4 des agriculteurs et des pépiniéristes utilisent des déchets urbains solides pour refertiliser leurs sols. En revanche, moins d'1/3 d'entre eux ont recours au compostage. Or, une utilisation directe des déchets urbains peut présenter de graves problèmes sanitaires...

 L'année 2008 a marqué un tournant dans la croissance et la répartition de la population dans le monde : pour la première fois, plus de la moitié de l'humanité vit en ville. Cette population urbaine continue de croître rapidement, particulièrement en Afrique et en Asie. En 2050, 20% des citadins seront africains ; ils ne sont que 4% à l'heure actuelle. A l'image des autres villes du continent, Ouagadougou (la capitale du Burkina Faso) connaît une forte extension. Sa population a été multipliée par 20 en moins d'un demi-siècle, passant de 60 000 habitants en 1962 à 1 200 000 habitants en 2007. Sa production annuelle de déchets était de 300 000 tonnes en 2007 et pourrait atteindre un million de tonnes en 2025. Comment traiter toutes ces ordures produites par une population en plein essor ? Leur gestion constitue en effet l'un des problèmes cruciaux de santé publique et d'environnement auquel les gouvernements et municipalités africains devront faire face dans les décennies à venir.

 Dans un contexte de forte dégradation des sols et d'engrais chimiques coûteux, l'agriculture périurbaine représente une alternative intéressante pour traiter utilement les déchets. En provenance directe des ménages ou récupérés sur les décharges sauvages, ils sont constitués à plus de 2/3 de substrats organiques et permettent de refertiliser les zones cultivées. S'il existe différents travaux concernant leurs effets sur les propriétés des sols, la provenance et la qualité de ces matières ainsi que les différents acteurs de la filière agricole en ville demeurent méconnus. Or, optimiser leur intervention et mieux les accompagner nécessite une bonne vision des implications, des contraintes et des attentes du secteur.

 Afin d'éclaircir ces points, des chercheurs de l'IRD ont mené, depuis 2007, des enquêtes sur 7 sites de la capitale burkinabè, regroupant la majorité des acteurs : les céréaliers, qui produisent essentiellement du maïs et du sorgho en périphérie de la ville ; les maraîchers, concentrés autour des grands barrages, des canaux centraux d'évacuation des eaux et le long des cours d'eau et qui font pousser des fruits et légumes très variés d'origine locale ou exotique (laitue, choux, aubergine, épinard, tomate, carotte, fraise, melon, etc.) ; les pépiniéristes, qui cultivent des plants de fleurs ainsi que des arbres fruitiers ou d'embellissement. D'après ces travaux, 71% des agriculteurs et 73% des pépiniéristes utilisent les déchets urbains solides (ordures ménagères, plumes de volaille, écailles de poisson, vidanges de fosses septiques...), seuls ou en combinaison. En revanche, seulement 17% des maraîchers font appel à ce type de substrats, leur préférant les fumiers d'élevage urbains, plus chers mais plus riches en éléments fertilisants comme l'azote et le phosphore.

 Ces enquêtes ont également mis en évidence que l’utilisation des composts reste très limitée à l’heure actuelle : seulement 27% des pépiniéristes et 14% des maraîchers font appel au compostage, tandis qu’aucun céréalier n’a recours à cette pratique, par manque de moyens (outils, eau, construction de fosses) ou tout simplement de temps. Pourtant, une utilisation directe des ordures urbaines comporte des risques sanitaires et environnementaux graves. Pour une revalorisation agricole saine de ces déchets, les gouvernements et municipalités doivent dont privilégier l’accessibilité aux composts, rendre leurs coûts abordables et promouvoir leur utilisation. "Pour mieux accompagner les acteurs de l’agriculture périurbaine, l’étude conclut sur la nécessité d’adapter au maximum la demande à l’offre en matières organiques, en tenant compte de la variabilité des systèmes de culture et de pouvoir contrôler l’impact environnemental. Conciliant valorisation des déchets, amélioration des sols et sécurité alimentaire, l’agriculture périurbaine se révèlera ainsi un véritable atout pour les villes africaines", indique l'IRD.