Le recyclage (du pneu), chasseur de moustiques?

Le 05/12/2015 à 21:03  

Le recyclage (du pneu), chasseur de moustiques? 

Pneus recyclés Mais quelle mouche a piqué le pneu recyclé, pour qu'il soit désormais un allié de la traque à la propagation des moustiques?  La question a sa réponse : le pneu transformé en granulat de caoutchouc, grâce au recyclage de pneus usagés sert de matière première à la fabrication d’un dispositif original et innovant, particulièrement intéressant dans les régions où ces p'tites bêtes abondent... Le principe est simple; encore fallait-il y penser : il consiste en un filtre de gouttière qui permet à l’eau de s’écouler normalement, tout en empêchant les bestioles d’atteindre les eaux stagnantes et donc d’installer leurs gites larvaires...

 Le moustique pique ; il transmet aussi des maladies parfois mortelles (dengue et de chikungunya), qui se transmettent via des épidémies, alors que l’on sait par ailleurs, que la petite bête est le plus souvent sédentaire : son champ d’action excède rarement un rayon de 25 mètres autour de son gîte larvaire d’origine, à savoir des eaux stagnantes.
Autant dire que dans les régions chaudes, la lutte anti-moustiques relève de la santé publique.

L’idée de Christophe Put et Thierry Suviri, les deux dirigeants d’Aedes, une société basée en Nouvelle Calédonie, était d’empêcher l’installation des gîtes larvaires : autant prendre le problème à la base. En 2012, ils ont imaginé un dispositif à installer dans les gouttières, à mi-chemin entre le filtre et le bouchon, à la fois suffisamment poreux pour laisser passer les eaux de pluie et suffisamment dense pour éviter aux moustiques de passer, donc de pondre. Naturellement, il fallait pour cela un matériau imputrescible, sans risque pour la santé ni pour l’environnement et capable de s’agglomérer aisément. Instinctivement, les deux associés se sont tournés vers les granulats de caoutchouc et ont fabriqué un prototype, baptisé « Aglostic ».

Si ce prototype était techniquement concluant, restaient des questions relatives à son efficacité : la porosité du filtre permet-elle malgré tout, de retenir toutes les larves des moustiques ? L’eau de pluie passe-t-elle suffisamment rapidement à travers pour ne pas déborder des gouttières ? Le dispositif sera-t-il intègre et pérenne dans le temps ?
Pour répondre à ces questions, il n’y avait pas trente six solutions : il était nécessaire de recourir à des experts, avant de passer à la transformation d’un prototype prometteur en un produit fini commercialisable. C’est dans ce contexte qu’Aliapur, qui a été sollicité, afin de fournir de l’aide en Recherche & Développement, a financé l’étude (des travaux qui ont duré près d’un an) et a scientifiquement validé les choix techniques d’Aedes pour son dispositif.
« Courant 2014, nous avons demandé au Centre de Transfert Technologique du Mans (CTTM), avec lequel nous travaillons régulièrement, de faire une étude approfondie sur ce dispositif », a récemment indiqué Jean-Philippe Faure, Directeur R&D d’Aliapur : « la taille de granulats à utiliser, le choix du liant, la résistance mécanique du dispositif, la vitesse d’infiltration et d’écoulement des eaux, la qualité du drainage, l’innocuité sanitaire et environnementale des eaux ainsi filtrées… »

S’il va de soi que les quantités de granulats qui pourraient être absorbées par ce nouveau procédé ne seraient pas très importantes au regard de ce qui est nécessaire pour confectionner des terrains sportifs et autres pelouses synthétiques, il reste que cette invention s’avèrera utile partout où le moustique sévit. Au demeurant, depuis que les bienfaits de la démarche entreprise ont été validés, la société Aedes a reçu plusieurs récompenses : soutenue par la BPI France, elle travaille désormais activement au déploiement de l’Aglostic, tandis qu’Aliapur a obtenu l’exclusivité de la licence d’exploitation du brevet pour la métropole et les Antilles (en échange du financement d’une année d’études et de tests). « La filière recherche donc aujourd’hui des partenaires industriels prêts à exploiter ce brevet, en particulier dans les secteurs du bâtiment et de la lutte contre les nuisibles », conclut Jean-Philippe Faure.