Les Amis de la Terre « allument » la filière DEEE française

Le 15/12/2016 à 12:03  

Les Amis de la Terre « allument » la filière DEEE française
DEEE Pour les 10 ans de la filière, les Amis de la terre n’y vont pas de main morte… En publiant un rapport de 36 pages un rapport de 36 pages , ce 7 décembre, relevant ce qui ne va pas, l’association délivre les résultats d’une enquête : la faiblesse du taux de recyclage réel (35 %), conjuguée à un renouvellement rapide de nos biens de consommations, contribue à un renouveau minier en France et à l’étranger.

Le 29 septembre dernier, le rapport d’information de la Sénatrice Marie-Christine Blandin tirait la sonnette d’alarme sur les impacts environnementaux et sociaux de notre consommation de téléphones portables (15 à  20 millions d’appareils neufs seraient commercialisés  chaque année en France, mais 15% seulement des téléphones "usagés" rejoindraient une filière de recyclage). Deux mois plus tard, c’est au tour du Collectif associatif « Les Amis de la Terre » d’établir des constats qui donnent à réfléchir…

La collecte plafonne à 43% de ce qui a été mis en marché en 2015... ce qui souligne à contrario que 57% des DEEE échappent à la filière agréée de recyclage et de dépollution ; le taux de réemploi étant de 2%, il est clair que les réfrigérateurs en panne ou les téléviseurs obsolètes ne prennent finalement pas si souvent qu'on pouvait le penser, le chemin du recyclage. Et ça, ça ne passa pas bien pour Camille Lecomte, chargée de campagne Production et consommation aux Amis de la Terre qui rappelle que le cahier des assigné aux éco-organismes vise un taux de 45% de collecte en 2016 (et 65% en 2019).

Et d’enfoncer le clou en indiquant que si la filière présente un taux de recyclage de 80% des déchets collectés, il en serait tout autrement : le rapport indique un petit 35% des déchets produits, un bilan peu flatteur et même préoccupant tant il est vrai que notre consommation d’équipements neufs monte en flèche (chaque français détiendrait une petite centaine d’équipements électriques et électroniques –cf, l’étude Ipsos de juin dernier), avec à la clé, une production comprise entre 17 et 23 kg de DEEE chaque année. « Pire, la complexification de ces appareils contraint la réutilisation de matières secondaires issues du recyclage : seuls 9 des 40 métaux présents dans les Smartphones proviennent à plus de 50 % du recyclage. Les 31 autres sont principalement issus de l’extraction minière ; or, ces métaux sont principalement exploités dans les pays du Sud dans des conditions régulièrement dénoncées par la société civile : conflits armés et travail des enfants en République Démocratique du Congo  (Rapport réalisé en 2016 par Amnesty International Voilà pourquoi on meurt), quand ce ne sont pas les déplacements et la répression des populations au Pérou, ou encore les pollutions et cancers à Baotou en Chine qui doivent être signalées
(www.lemonde.fr/planete/portfolio/).

Il est  estimé  que  le  coût  du  traitement  est  10  fois  moins  important  dans  les  pays  du  Sud  que  dans  les  pays  du  Nord ; autant dire que cette différence de prix est attractive : elle s’explique  par  une  législation  sociale  et  environnementale  beaucoup moins stricte et  des  techniques  de   recyclage   pour le moins « artisanales »…  Et c’est ainsi que chaque   année,   entre  550  000  et  1,3  millions  de  tonnes  de  déchets  électriques  et  électroniques  prennent le chemin de l’Afrique  et de l’Asie, en toute illégalité, sous couvert d’un cadre      commercial hasardeux, parfois sous couvert d’aide humanitaire, alors que ces déchets ne sont pas un cadeau pour les pays qui les accueillent.

A cela s’ajoute que « la crise de 2008 associée à la hausse du cours de certains métaux a engendré une hausse des vols de métaux, comme les bobines en étain des tubes cathodiques des téléviseurs », poursuit  Camille Lecomte, étant entendu que nombreuses sont les déchetteries françaises qui sont victimes de pillages organisés, tout comme les entreprises qui récupèrent ces DEEE, à telle enseigne que le ministère de l’intérieur a mis sur pied l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante afin de limiter la casse. Pour écouler cette marchandise volée, les exportations constituent un exutoire privilégié (il faut dire qu’à plus de 400 euros la tonne de DEEE au marché noir, les margoulins qui travaillent le plus souvent en bandes parfaitement organisées, se font de l’or en barre…). Et c'est ainsi qu'une belle partie de ces DEEE, normalement affectés à la filière mise en place, échappe à celle-ci...

Faut-il pour autant fustiger ce qui est mis en place ? Non. Les vols et autres trafics pullulent partout et dans bien des domaines… Cela dit, on pourrait prendre la décision d’imposer un allongement de la durée de vie d’un certain nombre d’appareils, comme on pourrait aussi prolonger la garantie de ceux-ci, donner l’assurance de trouver facilement les pièces détachées, ce qui limiterait la profusion de DEEE. Pour ce qui est des téléphones, que nombre d’utilisateurs changent sans qu’ils soient cassés, ou HS, histoire d’avoir le dernier modèle sorti en mains, là, il y aira sans doute fort à faire pour revenir au bon sens, tant ces utilisateurs sont imprégnés des stratégies marketing qui poussent à la consommation…