Les bio plastiques d’origine végétale : des produits renouvelables ET biodégradables

Selon les experts, la seule substitution des sacs de caisse par des sacs biodégradables pourrait représenter plus de 50 000 tonnes de matière consommée en 2010.
Pour Christophe Doukhi de Boissoudy, responsable de Novamont France, les fabricants de produits plastiques connaissent déjà cette alternative ou l’ont déjà utilisée et la simple substitution des sacs de caisse classiques par des sacs biodégradables est possible dès 2007…
Il accepte de répondre à quelques questions.



La société commercialise le Mater-Bi depuis 1994 ; ce bio plastique répond à la norme européenne sur les emballages NF EN 13432 et détient toutes les certifications actuelles de biodégradabilité et de compostage, dont le label de référence « OK Compost ».
En France, depuis 1996, Novamont collabore régulièrement à des travaux de recherche et à des opérations concrètes autour des bio plastiques. L’entreprise est membre du Comité Français pour la Biodégradabilité et plus généralement, elle s’est employée à développer la recherche et la connaissance au profit des matières plastiques biodégradables d’origine végétale.
Depuis 2005, Mater-Bi est le premier matériel plastique à avoir obtenu par AIB-Vinçotte les certifications « OK biodégradable SOIL » et « OK Compost Home ». Les deux certifications de biodégradation dans le sol et le compostage domestique garantissent que le film en Mater-Bi (des sacs pour la collecte sélective aux sacs de caisse, aux films pour emballage…) peut être éliminé dans un composteur domestique et, lorsqu’il est utilisé en agriculture (film de paillage), il se bio dégrade dans le sol.
On distingue 3 modes de fabrication différents :
 
 
 

Grâce à leurs performances et à leurs propriétés spécifiques, les polymères biodégradables pénètrent avec succès certains marchés de niches mais aussi des marchés de masse.
Le segment du sac biodégradable présente un fort potentiel mais le développement de ce marché passe par la mise en place d’une filière de compostage, développée de façon encore ponctuelle en France.
En agriculture, les matériaux biodégradables sont aujourd’hui passés de la phase R&D à celle de la commercialisation. Et force est de constater que les produits sont de plus en plus adéquats aux besoins ; les plus avancés étant les films de paillage.
Il s’agit là d’un marché où le biodégradable répond à un besoin tout autant qu’à une demande : économie en coûts de ramassage et de nettoyage, et en main d’œuvre constituent des atouts non négligeables… L’offre des produits biodégradables est aujourd’hui réellement aboutie pour certains segments de produits comme la sacherie, les emballages de protection comme pour les fruits et légumes ou pour la boulangerie. La restauration rapide, l’hygiène et la cosmétique sont des secteurs où le biodégradable peut faire de bonnes percées pour autant que l’engagement des entreprises dans une démarché écologique soit effectif.
 


En effet, l’épuisement probable à la fin de ce siècle des ressources fossiles (charbon, pétrole, gaz naturel, exploitées à la fois pour produire de l’énergie et comme matière première de la chimie du carbone) conduit à rechercher activement des produits de substitution répondant aux mêmes besoins d’utilisation.
D’ailleurs, J.C. Pasty précise dans son rapport (1) qu’il n’existe pas d’alternative à l’utilisation du carbone fossile en dehors du carbone fixé par les plantes (ou carbone végétal) et que la chimie végétale a donc vocation à se substituer à la pétrochimie.
D’autant plus que dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, l’Europe s’est engagée à stabiliser, puis à réduire très fortement les émissions de gaz à effet de serre. Plus récemment, le gouvernement français s’est fixé comme objectif de diviser les émissions de gaz à effet de serre par 4 d’ici 2050.
Ces objectifs ne pourront être atteints que par la relance vigoureuse de toutes les formes possibles d’économies d’énergie et par la mobilisation massive de la biomasse dans toutes ses utilisations.
La mobilisation de ressources renouvelables d’origine agricole peut donc, dans des conditions appropriées de mise en œuvre, apporter des réponses positives aux préoccupations du moment en matière de préservation de l’environnement (lutte contre l’effet de serre, amélioration de la qualité de l’air, élimination des déchets rémanents…).
Dans ce contexte, la production de bio plastiques peut se développer. Au lieu d’être fabriqués à partir de carbone fossile (plastiques traditionnels), ils mettent en œuvre du carbone végétal dont ils possèdent les caractéristiques : ils sont en effet biodégradables et renouvelables.
 
 
Quatre éléments y concourent (l’humidité, l’oxygène, la température, et les micro-organismes) et il est important que les 3 étapes du processus (fragmentation, bio assimilation et minéralisation) se réalisent.
De plus, il est indispensable de préciser la durée de biodégradation totale du matériau, puisqu’en fonction de l’utilisation de celui-ci, une durée trop courte ou trop longue n’a pas nécessairement d’intérêt.
Enfin la biodégradabilité ne doit pas être confondue avec l’innocuité, les sous-produits libérés pouvant être toxiques. Il est important de pouvoir mesurer ces notions, afin de valoriser la biodégradabilité.
 
 

Le seuil de biodégradabilité demandé de 90% doit être atteint en 6 mois au maximum.
En outre, pour palier l’absence de normes en la matière ou pour garantir la conformité à une norme, des organismes de certification ont créé des labels comme « OK Compost » (label de conformité avec EN 13432, reconnu par l’Afnor et le LNE), « OK Biodégradable », label de biodégradabilité dans le sol, ou encore le « Label de conformité avec EN 13432 » (en Allemagne).
En 2004, les principaux producteurs de bio plastiques (Basf, Novamont, Nature Works IIc, Rodenburg Biopolymers), encouragés par des organisations européennes (IBAW, ERRMA…(3), ont signé une charte, valable 10 ans, et soutenue par M. Verheugen, vice-président de la Commission.
Ils s’engagent à utiliser, dans le secteur de l’emballage, des polymères respectueux de l’environnement et à garantir un haut niveau de biodégradabilité pour leurs produits.
Ils reconnaissent la norme européenne comme norme de « base », définissent les objectifs ainsi que les règles de production des polymères biodégradables et compostables, de même que les procédures de certification.
 


 
On peut par ailleurs avancer les résultats tirés d’une étude USIPA-PwC, intitulée « Gaz à effet de serre : Cap 2008 », datant d’octobre 2003.
Ainsi, la substitution du polyéthylène par du plastique issu d’amidon, dans 3 applications différentes, permet d’obtenir dans tous les cas, un bilan positif au regard de la diminution des émissions de CO2.
D’une manière générale, la comparaison des produits issus de matières premières fossiles avec des produits issus du végétal, dans les mêmes conditions de fabrication, est, d’un point de vue environnemental (effet de serre, pollution de l’air, métaux lourds…) à l’avantage des produits issus du végétal.
 
C’est la raison pour laquelle, bien que pouvant être incinérés, la voie naturelle de leur valorisation est le compostage. La production de compost, dans la seule mesure où il est de qualité, constitue une réponse positive aux problèmes d’épuisement des sols et de récupération de matière à partir de déchets.
 

L’utilisation de ces matières plastiques en France atteignait 6,7 millions de tonnes en 2003. Ils sont fabriqués à partir de polymères synthétiques (le polyéthylène, le polypropylène, le polyuréthane et le polystyrène) et connaissent de très nombreux débouchés dont l’emballage (notamment agroalimentaire) reste le principal.
La prise de conscience de la pollution engendrée par une exploitation intensive du plastique mais aussi des coûts financiers et environnementaux de son recyclage, condamne à la disparition certains matériaux (il en est ainsi du PVC dans les serres horticoles hollandaises et dans la fabrication de bouteilles d’eau minérale, mais aussi du polystyrène en Allemagne) et à rechercher des alternatives plus respectueuses de l’environnement.

La plupart des producteurs de plastiques traditionnels sont d’ailleurs en mesure ou produisent déjà des plastiques biodégradables.
Ces plastiques biodégradables, d’origine fossile ou végétale, ne doivent pas être confondus avec les plastiques « additivés » parfois improprement appelés « (bio) dégradables » qui ne sont en réalité que des plastiques fragmentables.
Ceux-ci par leur fragmentation en lambeaux, confettis ou poussière, ne répondent au mieux qu’aux problèmes posés par la pollution visuelle. Par ailleurs, une fois fragmentés, ils interdisent à tout jamais leur récupération et leur élimination.
 
 
Cette croissance a été en grande partie due à l’ouverture aux USA d’une usine capable de produire 140 000 tonnes de PLA, fabriqué à partir de glucose, produit lui-même dérivé de l’amidon.
Novamont de son côté, a développé sa production de manière régulière.
Ces deux sociétés prévoient une extension de leur capacité de production, tandis que d’autres se préparent à jouer un rôle important sur le marché ; c’est le cas notamment de Dupont, Mitsui-Tohatsu, Dai Nippon et de Showa Denko. Dans le même temps, on remarque l’émergence de nombreuses sociétés impliquées dans la recherche de nouvelles solutions d’origine végétale (cf. le projet Agrice).
Le marché mondial des bio plastiques était estimé en 2003 à environ 100 000 tonnes dont la plus grande partie, 60%, en Europe. Cette estimation est toutefois rendue difficile par le grand nombre de sociétés, dont certaines ont changé de dénomination ou d’activité. Par ailleurs, les matières premières utilisées (céréales, pomme de terre), sont variées.
Les perspectives établies à partir des chiffres actuels et sur la base des sources disponibles (rapport Pro-Bip, Ernst & Young…) sont établies sur la base de trois scénarii :
Un scénario « sans politique incitative », c'est-à-dire une simple prolongation de la tendance actuelle
Un scénario avec mise en place, en particulier en Europe, d’une politique incitative
Un scénario de substitution maximale tenant compte des limites techniques et économiques.
Sachant qu’une tonne de maïs fournit 18,5% d’aliments de gluten de maïs, 4,5% de protéines , 3,2% de tourteaux de germe et 2,9% d’huiles de germe, cela fait autant de produits, sources de protéines, et nécessaires à nos élevages, qui ne sont pas importés. Dans le cas du blé, les co-produits sont principalement des sons et aliments de gluten de blé.
Enfin, il est difficile de quantifier de façon précise le nombre d’emplois directs ou indirects, créé ou maintenus, mais on peut affirmer que cette substitution a un effet positif en terme de maintien des emplois en milieu rural.
 
 
Chez Nature Works Llc., le prix du PLA est, par exemple, 2 fois plus cher que le polystyrène et 1,5 fois plus cher que le PET (mais à pleines capacités, il serait égal à celui du PET, soit environ 1 €).
Chez Treofan, le prix du « PLA bi-orienté » est 2 fois plus cher que son concurrent le polypropylène.
Chez Dupont, le polyester biodégradable coûte 2 fois plus cher que le polyester classique.
En effet, le recours aux biotechnologies, tout autant que la formulation de compositions complexes pour de faibles tonnages, renchérit les coûts.
Cependant, les quantités produites restant confidentielles et les efforts de R&D considérables, les coûts fixes (dont environ 30% sont attribuables à la R&D) ont une part importante dans le calcul du prix de revient des bio plastiques.
Il y a donc d’importantes réserves d’économies d’échelle, qui se réaliseront naturellement au fur et à mesure de l’augmentation de la demande et donc des quantités produites.
Il est intéressant de noter que les plastiques traditionnels ont, eux aussi, connu après le 2ème guerre mondiale, la même évolution de marché.
Toutefois, il est à signaler que contrairement au prix des plastiques traditionnels, le coût des bio plastiques n’est que peu dépendant de celui du pétrole.
 


Et l’on peut noter sur ce point l’avance des Etats-Unis. En effet, le « Conseil national de la recherche », mis en place par l’administration américaine, a fixé en 2000, des objectifs très ambitieux, qui devront être atteints à plus ou moins long terme (2020-2050). Dans le secteur des biomatériaux, comprenant les fibres végétales, le bois, les plastiques, la part de marchés visée est de 10% dès 2020 (contre un peu moins de 10% actuellement). Ces objectifs sont parfaitement crédibles, compte tenu des résultats déjà engrangés sous forme de dépôts de brevets. En outre, l’absence d’une législation visant à promouvoir, voire à imposer pour certaines applications, l’utilisation de matériaux biodégradables et issus de ressources renouvelables fait défaut. Il est indispensable d’imposer les normes existantes sur la bio dégradabilité et la compostabilité et d’en créer d’autres plus spécifiques à l’instar de la récente norme NF U 52001 concernant les matériaux destinés à l’agriculture.
La promotion des bio plastiques peut donc prendre différentes formes : interdictions, taux d’incorporation minimum, recours à des normes et des critères de valorisation, exonérations fiscales, organisation de la filière de valorisation…
Des initiatives visant à l’interdiction des sacs plastiques non biodégradables existent déjà dans certains pays. En Europe, l’Irlande par exemple, a créé une taxe « Plastax » (Plastic Shopping Bag Levy) de 0,15 € par sac, dont doit s’acquitter le consommateur et qui est reversée par le commerçant au Fonds pour l’Environnement. De même, certaines régions de France comme l’Ile de Ré et la Corse, ont déjà interdit la distribution de sacs plastiques. Enfin, les bio plastiques devraient, en Allemagne, payer la même « green dot » que la papier.
D’autre part, les plastiques en agriculture ne peuvent être ni brûlés en plein champ, ni enfouis. Leur état après utilisation rend leur recyclage difficile et leur collecte onéreuse ; l’utilisation des bio plastiques, pouvant être compostés ou laissés sur le sol, est une alternative très intéressante et donc vivement encouragée.
Je souhaite évidemment une généralisation de ces initiatives…
La promotion des bio plastiques pourrait passer par une taxation des produits d’origine fossile ou une fiscalité adaptée et incitative, comme une diminution de la TVA appliquée aux produits bio dégradables.
Il serait également intéressant de développer des filières de compostage…
La filière naturellement adaptée aux matériaux bio dégradables est celle du compost. Il est par conséquent indispensable, avant de procéder à toute substitution d’un polymère conventionnel par un polymère biodégradable, d’envisager en priorité sa valorisation biologique. L’absence de filière organisée dédiée à l’élimination et à la valorisation des déchets organiques ainsi que le manque d’information et d’éducation du consommateur ou du citoyen en ce qui concerne le tri des déchets conduit à ne pas donner aux bio plastiques leur juste valeur.
Remarquons que les pays européens les plus avancés en matière de produit biodégradables sont ceux qui ont mis en place ces filières de valorisation.
 
 
Afin toutefois de créer un terrain favorable au développement de ces produits, il est nécessaire de mettre en oeuvre, de manière concertée, une politique volontariste impliquant tous les acteurs concernés, depuis les agriculteurs jusqu’aux consommateurs, en passant par la recherche, l’industrie, la grande distribution et l’administration.
Une telle politique nécessite de fixer des objectifs réalistes mais ambitieux, fondés sur une vision commune des atouts environnementaux des bio plastiques, d’identifier les obstacles et les facteurs de développement.
D’ores et déjà, un certain nombre de mesures apparaissent indispensables :
 
 
 
 
 
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(1) « les débouchés non alimentaires des produits agricoles : un enjeu pour la France et l’UE », (sorti en 2004)
(2) Comité français pour la Biodégradabilité et International biodégradable Polymers Association & Working Group (Allemagne)
(3) European Renewable Raw Materials Association
	
	

