Nonant le Pin : pour qui sonne le gong?

Le 26/09/2015 à 12:53  
Nonant le Pin : pour qui sonne le gong?
Gants de boxe « Des non conformités ayant été constatées (aucune précision n’étant fournie quant à ces non conformités), j’ai informé l’entreprise que le site ne peut recevoir de déchets en l’état actuel ». C’est en ces termes que la préfète de l’Orne, Isabelle David, a communiqué, le 22 septembre dernier, allant dans le sens souhaité par la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal, lors de sa visite du 26 août dernier (voir GDE : Ségolène Royal entre en scène), s’agissant de l’exploitation par GDE, de son centre de stockage de résidus de broyage automobile, situé à Nonant-le-Pin…

 Compte tenu des multiples rebondissements de cette affaire et afin de tirer certains points au clair (voir notamment GDE à Nonant le Pin : un rapport tronqué?) il a été décidé fin aôut, par le ministère de l'Ecologie,  de dépêcher une équipe de spécialistes, sur le terrain. Les experts du BRGM, Bureau de recherches géologiques minières, mandatés tout début septembre ont tout récemment rendu leur rapport, lequel a été transmis à Guy Dauphin Environnement, qui dispose d'un délai pour faire part de ses observations (c’est seulement au terme de cette période que la préfète de l’Orne décidera s’il y a lieu de poursuivre la procédure classique prévalant pour les installations classées, avec l’envoi d’un projet de mise en demeure qui lui aussi, sera soumis au principe du contradictoire).

Le communiqué publié par la préfecture le 22 septembre étant pour le moins ambigu, avec pour conclusion « des non-conformités ayant été constatées, j’ai informé l’entreprise GDE estimer que ce site ne peut recevoir de déchets en l’état actuel », rien n’interdirait de trier in situ…
A ce stade, une autre question se posait immédiatement : ces « non conformités » sont –elles de nature à fermer le site » qui a nécessité un investissement de 30 millions d’euros? L’entreprise de recyclage, répond clairement « non » à cette question. Pour Hugues Moutouh, directeur délégué de l’entreprise, le rapport est rédigé « avec beaucoup de précautions ; il a même une tonalité positive. On nous dit qu’il y a eu des dégradations sur le site ; on le sait ». « On est dans un échange administratif courtois. Il n’y a pas de mise en demeure. S’il y avait un danger imminent, il y aurait suspension » (…) « Nous avons toujours la possibilité de pratiquer le tri sur le site, car le rapport ne concerne que la partie stockage », l’entreprise ayant évidemment consulté des avocats avant de tenir ces propos : les juristes chargés d’analyser la lettre du préfet de l’Orne envoyé le 22 septembre considèrent en effet que « la décision est ambiguë, tant par la forme que le fond. Sur la forme, il ne s’agit pas d’un arrêté préfectoral. De plus, la suspension d’activité en cas de non-conformité constitue une sanction administrative qui obéit à une procédure qui n’a pas été mise en œuvre. En somme, l’illégalité de la décision considérée est tellement manifeste qu’on peine à y voir une décision obligeant la société GDE à suspendre son activité ». Et de conclure que « l’activité du centre de tri n’est nullement remise en cause par le rapport d’inspection ou la lettre du préfet ».match

Il reste que pour les opposants, « la ministre doit aller plus loin » et rapidement qui plus est, l’association Nonant Environnement souhaitant clairement une décision de suspension suffisamment étayée pour que GDE ne puisse mettre en œuvre aucun référé.
Dans ce contexte, l’entreprise a donc souhaité reprendre ses activités de tri, l’activité stockage ne pouvant manifestement redémarrer qu'après les travaux de remise en état du site : plusieurs camions (dont on ignore la nature du contenu) sont arrivés sur le site hier matin, ce qui a ravivé la flamme. Ils ont été immédiatement bloqués par une quarantaine d’opposants, qui ont installé quatre tracteurs, histoire de barrer l’accès du site aux véhicules qui livreraient des déchets sur l’installation.
L’entreprise n’a pas manqué de rappeler détenir les autorisations nécessaires validées par le juge administratif pour exploiter, et même d’avoir obtenu du tribunal administratif de Caen, une provision d’un million d’euros (soit, un total d’1,7 million d’euros versés par l’Etat depuis un an), ces sommes étant destinées à compenser sous forme d’indemnités, les carences de l‘Etat (voir GDE : et paf! 700 000 euros!).
GDE a en effet attaqué l’Etat, devant le tribunal administratif de Caen, du fait « d’un recours tardif du préfet à la force publique » (6 octobre 2014) alors « que les décisions de justice des 11 décembre 2013, 7 et 14 janvier 2014 avaient ordonné l’expulsion des occupants ».
Le manque à gagner (non exploitation du site et nécessité d’évacuer ses RBA, déchets ultimes liés à l’activité de son site de Rocquancourt dans le Calvados, ailleurs qu’à Nonant, moyennant finances) serait lui aussi, susceptible d’être indemnisé (on avance la somme de 80 millions d’euros), surtout si l’Etat décidait de revenir sur les autorisations accordées…

La préfète de l'Orne, accompagnée de Laurent Beauvais, président de la Base-Normandie, et du député Yves Goasdoué a tenu uneCSDU de Nonant le Pin conférence de presse hier en milieu de journée, afin de délivrer des informations complémentaires concernant le rapport d'inspection et les non conformités relevées : si les «principales non-conformités portent sur le centre d'enfouissement, il  y a une non-conformité relative aux normes incendie qui porte sur le centre de tri : donc, l'ensemble du site est concerné par ces non-conformités et ne peut pas être exploité en l'état ». Cela dit, la préfète  a indiqué aussi, que «GDE peut faire venir autant de camions qu'il le souhaite; en revanche, il ne doit pas faire venir des déchets susceptibles d'être triés et enfouis sur son site».
Pour ce qui touche à la procédure administrative en cours, Isabelle David a confirmé à la presse avoir envoyé un courrier en recommandé à destination de l'entreprise de recyclage, afin de l'informer du lancement de la procédure contradicatoire et de lui présenter un projet d'arrêté de mise en demeure, ce qui donne à  GDE un délai de 15 jours pour faire part de ses observations. Ségolène Royal aurait depuis lors, demandé à la préfecture de l'Orne « de prendre un arrêté de mesure d'urgence prévoyant (à titre conservatoire) l'interdiction d'apport de déchets sur le site et ce, au cas où GDE persisterait à vouloir apporter des déchets ».