Recyclage : Michelin trace sa route

Le 10/02/2014 à 12:47  

Recyclage : Michelin trace sa route

pneus usagés Quand bien même on ressent une certaine pression pour que les constructeurs passent la vitesse supérieure afin d'intégrer du recyclé et pratiquer le recyclage, force est de constater qu’il en est qui vont plus vite que d’autres. 2014 marquera sans doute un tournant dans la vie de la marque française : elle envisage très sérieusement, via un programme de R&D très ambitieux, de valoriser les gommes usagées, en pneus neufs et de qualité…

Quand bien même on subit une crise majeure et qui perdure, les prévisions concernant le marché mondial du pneu, n’imaginent pas autrement la donne qu’à la hausse. Déduction logique, la demande en matières premières ne peut, qu’augmenter elle aussi au cours des prochaines décennies. L’idée de miser sur le recyclage à grande échelle est donc judicieuse… Faire du neuf avec du vieux, comme disent les « anciens » reprend plus que jamais, tout son sens.

L’idée mise en avant consistera à réinjecter, à l’échelle industrielle, des matières recyclées provenant de pneus usagés, dans les pneus neufs. L'entreprise française a pour objectif en effet, de développer deux solutions techniques pour mieux valoriser ces tonnages de pneumatiques usagés, qui ont comme chacun sait, le statut de déchet (encombrant qui plus est).
C’est ainsi qu’une nouvelle route s'ouvre aux pneus usagés, et ce afin d’en optimiser le recyclage : Michelin lance en effet un projet R&D appelé TREC (Tyre Recycling) avec le CEA, SDTech, spécialiste des poudres ultrafines, et Protéus, filiale de PCAS experte en biotechnologies industrielles. Il s’agit d’un consortium français, à 100%, qui aura pour mission d’explorer les voies de l’innovation : la régénération du mélange de gommes usagées pour fabriquer des pneus neufs, et la production d'alcool destiné à la filière « BioButterfly ».

TREC Régénération, consiste en la régénération de mélanges de gomme pour la fabrication de pneumatiques neufs.
SDTech intervient au niveau de la micronisation des poudres, après la collecte et le traitement des pneus usés. Cette PME analysera leurs propriétés mécaniques et thermiques afin de déterminer « les matières premières qui ne dégraderont pas le nouveau pneu », affirme le PDG de l’entreprise, Jalil Benabdillah.
Protéus se chargera de la dévulcanisation sélective du pneu : il s’agira d'isoler, à l'aide de micro-organismes (et donc de biotechnologies), les éléments impropres.
L’œuvre conjuguée de SDTech et de Protéus permettra de produire une micro-poudrette qui sera aussi performante que de la matière vierge de sorte qu’il sera possible de produire de nouveaux pneus ayant les mêmes caractéristiques que s’ils avaient été fabriqués avec de la matière vierge. « Protéus dispose d'une banque de micro-organismes extraordinaire. Nous avions besoin de cette expertise en biotechnologies », a d’ailleurs indiqué Dominique Aimon, porte-parole scientifique de Michelin, qui exprime le souhait d’aller plus avant que ce que permet le recyclage actuel. « Si 100 % des pneus usagés sont déjà recyclés, les pneumatiques réalisés à partir de poudres régénérées ne sont pas encore de très bonne qualité », ajoute le spécialiste. L’objectif est de faire avec du recyclé aussi bien qu’avec du neuf.

TREC Alcool, permettra la production d'un intermédiaire chimique nécessaire à la synthèse de matières premières utilisées dans la fabrication de pneumatiques.
L'alcool produit par ce biais interviendra notamment dans la filière française, en complément des alcools issus de biomasses telles que sucres, bois, résidus agricoles...
Pour cette deuxième voie, il est prévu que Michelin, le CEA et Protéus, mettent au point une chaine de technologies allant de la gazéification des pneumatiques usagés à la production d’alcool par fermentation du gaz de synthèse obtenu (syngaz).
Ce programme d’éco-conception et de recyclage, particulièrement ambitieux, d’une durée de 8 ans, couvrira l'ensemble des étapes de recherche et de développement des procédés, depuis les concepts scientifiques, jusqu'à la validation sur un démonstrateur industriel, en passant par la phase pilote et en s'appuyant sur la complémentarité des compétences et expertises des partenaires.

Pour ce faire, un budget de 51 Millions d’euros dont l’Ademe financera 13,3 Millions d’euros. Le démonstrateur industriel devrait voir le jour dans 8 ans, donc. On gardera en mémoire, que le volume annuel de pneumatiques usagés atteint 350 000 tonnes en France (17 millions de tonnes au niveau mondial).
A n’en point douter en tout cas, ces industriels souhaitent franchir une nouvelle étape, et non des moindres, sans pour autant minimiser le travail qui a été fait depuis 2002, année à partir de laquelle l’Europe a obligé à valoriser les vieux pneus. S’ils servent valablement, ces pneus usagés, pour construire des murs de soutènement, permettre aux revêtements de sol d’être souples, de fabriquer du gazon synthétique ou encore du combustible de qualité que les cimentiers ou aciéristes ne rechignent pas à consommer, si Aliapur a su construire et parfaitement consolider une filière reconnue de qualité, le message transmis par le manufacturier est clair : on doit aller plus loin et encore mieux faire…